C& talks to young photographer Namsa Leuba
C& : Qu’est-ce qui vous a fait choisir le média de la photographie ?
Namsa Leuba : Avant de commencer à étudier la photographie et dans le cadre de mon master en Direction Artistique à l’Université de Lausanne en Suisse, j’ai étudié le Design de l’information et pendant ma deuxième année, j’ai eu un cours de photographie. A ce moment-là, je me suis sentie totalement en harmonie avec ce média et je savais que je voulais m’améliorer dans ce domaine. Une photo exprime parfois bien plus que des milliers de mots.
C& : Comment avez-vous eu l’idée des séries Zulu Kids et Ya Kala Ben ?
NL : Ces deux séries ont été inspirées par des statuettes. Ma mère guinéenne est musulmane et animiste, quant à mon père, il est suisse et protestant même si je n’ai pas été baptisée. Je me suis beaucoup intéressée à l’aspect religieux du pays d’origine de ma mère. J’ai découvert un côté animiste à la culture guinéenne et j’ai été exposée à l’élément supranaturel en Guinée pendant mon enfance. J’ai rendu visite à des « marabouts » (une sorte de sorcier) quand j’étais plus jeune et pour Ya Kala Ben (2011), j’ai participé à de nombreuses cérémonies et à des rituels. A mes yeux, il était important de faire ce travail car je me sens davantage consciente de l’existence d’un monde parallèle et d’un monde d’esprits.
La série Zulu kids a été produite pendant que j’étais en résidence en Afrique du Sud en 2014 avec Pro Helvetia, le conseil artistique suisse. Dans le sillage de Ya kala Ben qui explore les rituels communs à la cosmogonie de la Guinée, j’ai continué mes recherches sur les pratiques culturelles indigènes en Afrique. En travaillant avec les communautés des Khoi San, Zulu, et des groupes ethniques de Lesotho en Afrique du Sud, j’ai présenté des photographies qui juxtaposent des personnages avec des paysages et des traditions issus de l’environnement immédiat. J’essaie de reconnaître ma position à la fois en qualité d’insider et d’outsider – mes œuvres se veulent dresser un portrait de la culture africaine sous ses aspects à la fois fantastique (vue de l’extérieur) et contemporain.
C& : Les images dans votre série Ya Kala Ben sont merveilleusement esthétiques, cependant elles préservent une richesse culturelle que les spectateurs apprécient. Vous avez déclaré : « J’ai essayé de toucher l’intouchable » dans cette série. Dans quelle mesure y êtes-vous parvenue ?
NL : Je m’intéressais à la construction et à la déconstruction du corps, ainsi qu’à la représentation de l’invisible. J’ai voyagé en Guinée et observé les différents rituels et cérémonies afin de trouver ceux à partir desquels je voulais créer la série. Les statuettes que j’ai observées sont des artefacts rituels communs dans les cérémonies guinéennes ; ils représentent un autre monde. Ce sont les racines du vivant. De cette façon, je cherchais à toucher l’intouchable. La photographie me permet d’exorciser mes émotions et mon passé en racontant mon histoire par le biais de points de vue différents dans une forme de syncrétisme.
C& : Quel genre d’histoires voulez-vous raconter par rapport aux identités africaines et diasporiques avec les portraits que vous faites ?
NL : Mon travail se concentre sur l’identité africaine vue au travers des yeux occidentaux. Je m’intéresse à la cosmogonie africaine afin d’entrer en un dialogue avec mes origines.
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Propos recueillis par Aïcha Diallo
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